Août / Septembre

Dimanche 3 août
Après la fureur et les grondements de Hulk, un coin ombragé du parc Tête d’Or pour achever la pause dominicale.
Repos nécessaire pour plusieurs muscles des cuisses après la tentative avortée de faire du ski nautique. Sur invitation de CM, LD et moi rejoignons les bords du lac de Paladru dans une petite demeure magnifiquement placée. Sa famille est l’un des vingt-quatre actionnaires du lac (l’eau, pas le sol).
Des parents charmants, un gentil mari, une sœur présente ayant un visage et des attitudes de l’épouse de Heïm (décidément, je n’en sors pas !) et CM, toujours sublime. Sa démonstration de ski nautique, elle a commencé à l’age de cinq ans, m’époustoufle. LD, malade à l’arrivée (sans doute une intoxication alimentaire) a pu déployer sa puissance musculaire pour prolonger quelques sorties de l’eau, sans toutefois parvenir à se redresser, gardant ainsi une position couchée très inconfortable sur l’eau filante. Je n’ai pas eu ce privilège : le double ski m’a permis, au mieux, un grand écart nécessitant le lâcher du palet ; le monoski a lui engendré une douleur au genou droit. Fiasco, mais grand éclat de rire.
Après le repas partagé dans le joli petit parc, je me suis rabattu sur une vieille barque pour goûter le calme apaisant du lieu. Touchant de voir la lumineuse CM au sein de sa famille.
Imprévisible nature que la mienne : là où des réunions ne m’inspirent que le retrait ronchon, le repas d’hier m’a inspiré pour les plus vives réparties, ne manquant pas d’amuser la tablée.

La semaine s’annonce la plus pédagogique depuis bien des semaines avec les deux groupes Sport et les aspirants ambulanciers de retour de stage. Ce soir, passage des parents B pour une nuit chez nous après avoir pris part aux festivités d’un mariage. Calme d’août qui se profile, espérons pas trop lourd en degrés, rien donc pour déclencher des foudres. L’occasion de peaufiner la mise en forme et l’illustration des années mises en ligne, avant une ‘tite promo à la rentrée.

22h37. Un vrai salarié moyen comme un autre, qui fait sa besogne pour assurer sa vie matérielle, mais sans aucune finalité professionnelle. Ma morosité du soir signe la présence, dès demain matin, d’un FFP avec un groupe sans intérêt (la réciproque est certaine). Aucune envie de me faire apprécier, d’ailleurs. Je délivrerai mes conseils pour répondre aux exigences de leur UC3, une bonne part sera improvisée, n’ayant rien préparé, mais reprenant des bouts d’interventions antérieures.
Sur France Inter, en fond, sans doute une spéciale Jazz in Marciac. Petite pensée au Gers qui laisse de bien agréables souvenirs encore tout frais.
Le peu de vélo fait aujourd’hui a sans doute évité que je me rouille, que mes jambes se bloquent après les efforts déraisonnables d’hier.
Bref détour vers le mendiant ingrat avant l’extinction du filament.

Lundi 4 août, 22h11
Soljenitsyne s’est éteint, doucement, à Moscou, en contraste avec le fracas salutaire de ses œuvres. Sans doute que son nationalisme antilibéral de ces dernières années a terni l’image de l’écrivain aux yeux de l’Occident capitaliste, mais cela ne doit pas rendre secondaires des témoignages qui dépassent l’évolution personnelle de leur auteur.
Terrible, atroce année 1895 pour Bloy qui laisse quelques empreintes d’un désespoir hors norme. Un peu l’état de ceux qui, à Heaumont dans le Nord, ont subi le vacarme et les assauts destructeurs d’une tornade focalisée. Des gens morts d’avoir simplement été chez eux au moment de la déferlante des airs. Depuis que je me trouve en position de propriétaire, je saisis plus charnellement le drame de la perte inopinée de ses biens.

Jeudi 7 août
7h47. Pôpa, Anna, Jim, Aurélia, Alex, Raph, ma BB et moi : au complet la tablée chez nous. Le plus jeune couple revient de trois semaines en Corse : une vraie plongée pédestre dans les beautés en altitude, en eaux transparentes, en ruelles intactes, en panoramas subjuguants. En plus de deux cents photos numériques, mon frère et sa douce nous font vivre un peu de leur séjour baroudeur.
Fin novembre, ce sera les soixante ans de notre père : il nous faudra songer à un anniversaire un peu hors norme. Peut-être, au-delà des traditionnels présents, lui écrire et lui interpréter quelque chose qui marque l’événement familial.

Tintouin autour des JO de Pékin dont la cérémonie d’ouverture est programmée pour demain. Peu d’enclin pour m’étendre sur le sujet. Un petit pronostic cependant, malgré l’enthousiasme des sportifs français : la descente française au rang des pays médaillés va se poursuivre, confirmant la marginalisation de notre pays au profit des puissances montantes.

Mardi 12 août, 23h30
Confirmation de la minable moisson française aux JO. Notre façon de boycotter les jeux, c’est de s’empêcher à tout prix d’atteindre le podium. Parangon du désastre, la touchante Manaudou qui a sacrifié sa potentielle suite prodigieuse de carrière sportive sur l’autel des broutilles caractérielles et des vétilles sentimentales. Le bourru Lucas, l’inflexible entraîneur, avait raison sur toute la ligne. Cela doit être d’autant plus difficile à accepter pour la nageuse en perdition.
Pendant ces dérisoires états d’âme, la Russie s’accorde une réponse disproportionnée au stupide coup de force géorgien contre les casques bleus russes basés en Ossétie du Sud. Les sales habitudes reviennent vite au pouvoir, même s’il n’est plus soviétique. Bush gronde, Sarkozy tente les bons offices et le duo Medvedev-Poutine se cabre, misant sur la mollesse d’un Conseil de sécurité paralysé par son veto. Comme au temps de la guerre froide, chacun teste l’autre pour mieux positionner ses atouts.
Semaine grise, et pas seulement sur les trois quarts du territoire français.

Vendredi 15 août, 23h30
Ma BB aux urgences pour sa nuit de labeur, moi sans ressort après quelques virtuelles déconvenues.
A noter, le commentaire charmant d’un anonyme à la suite de mon article Le Bonheur, en Gers et en Auch, compilation des pages du Journal consacrées à ce séjour. Il estime mon style indigeste cumulant l’atrocement compliqué, le torturé maladif et l’ennuyeux ton d’un rapport de police ! Tout et son contraire, donc. Autant attaquer sans retenue et rendre sa sentence : je serais, quel ultime statut, « littérairement incompétent » : l’anonyme le recopie une seconde fois pour être bien sûr que ça m’atteigne.
Loupé ! Non seulement je ne censure pas cette diarrhéique intervention, mais je m’en amuse profondément. A quelques signes, je soupçonne un familier, ou prétendu tel, d’être derrière ce dérisoire donneur de leçon. L’effet ne va pas le réjouir : ça m’incite à amplifier encore mes sales habitudes littéraires et à l’emmerder stellairement !

Nuit dernière, sale dérive des songes : inversion totale de ma situation tout en ayant conscience que cela ne correspondait en rien à mon enclin naturel. Me voilà durablement présent au château, juste à cette époque d’anniversaire quasiment oublié de mon conscient, et me demandant quand je pourrais m’éclipser quelques jours et sous quel prétexte. Un malaise profond dans ma situation cauchemardée qui me rappelait celui des années 96 et 97 lorsque j’ai commencé à mal supporter cette ambiance de vie. 
A fuir dès que l’occasion se présentait, se presser dans les pièces communes pour éviter les autres résidents, espérer le plateau-repas dans sa piaule châtelaine pour se dispenser des interminables et nauséeux repas alcoolisés où Heïm rabâchait jusqu’à l’inaudible.

Alors pas ces clandestines interventions sur mon blog qui vont me faire changer d’un iota ma tonalité littéraire. Témoigner et s’indigner sans frilosité textuelle. Vivre les mots et merde aux simplistes du vocabulaire.

Samedi 16 août
10h36. Calme, face au lac, en attendant la séance de 11h05 pour le sombre Dark Knight.
Alors qu’elle déçoit aux JO, la Russie fait son matamore sur les planches criblées de la diplomatie internationale.
Ma thèse, pour le commentaire anonyme d’hier : un missi dominici d’Alice. La formule « il est mille fois meilleur que son style » signe son attaque affective.
Quand saisira-t-elle que j’écris au fil de la plume, quasiment d’instinct, et que si ça ne vient pas, je délaisse la plume attendant un moment plus inspiré. Que cela respire l’artificiel, pourquoi pas ; son intervention s’apparente elle à de l’acharnement pathologique.
Vaine visée, elle n’obtiendra pas l’once d’une concession sur ce plan.
Si ce n’était pas elle, derrière cette piquette minable, cela me donnerait l’occasion de piétiner un nouvel adversaire dans la bonne humeur !

Lundi 18 août, 0h12
Cette sensation d’un temps sous-exploité, gâché à d’inutiles occupations, amplifie la sombre humeur.
Un qui densifiait son temps de vie pour produire son œuvre gigantesque, c’est Soljenitsyne. Vu l’Apostrophe de 1983 qui lui était consacré : personnage lumineux d’intelligence et ayant eu la prescience de ce qui devait se passer dans sa patrie, avec un effondrement de l’URSS insufflé par l’intérieur.
Pas une grande considération de l’espèce humaine dans son piétinement, voire son effondrement de conscience au XXe siècle.
Progresser, à l’échelle humaine, passe d’abord par le respect de la justice et, de fait, la crainte de la sanction potentielle.
Autre très forte prémonition de l’écrivain russe en exil, et à contre-courant de toute la physionomie géopolitique d’alors, celle de son retour prochain chez lui. Onze ans plus tard, il foulera la terre de ses aïeux.
Sans doute à ce genre d’indice que l’on peut certifier être en présence d’un esprit d’exception.

Lundi 18 août, 23h
Enième scan approfondi de mon disque dur par un logiciel dénicheur de saloperie, mais cette fois en ayant fait appel à la solidarité entre internautes. Deux minutes après avoir posté mes explications et un rapport fourni par un logiciel souvent cité sur les forums compétents, je reçois un message d’actions à faire et un autre m’invitant à installer un anti-virus bien plus efficace que les Avast et consorts. Faire confiance, en espérant la désinfection de l’ordi.
Univers fascinant des virus, chevaux de Troie, trojan, etc. La métaphore médicale s’accompagne d’outils plus ou moins fiables pour éradiquer les invasions.
En attendant la fin de l’exploration, petit détour par Mon Journal de Bloy, année 1897.

Mardi 19 août, 22h47
Logique émotionnelle de la proximité. Bloy rapporte un fait divers meurtrier : l’incendie du Bazar de la Charité dont les victimes appartenaient à la classe aisée. Mobilisation nationale pour décupler l’impact du drame ; fulmination de Bloy que l’on pourrait épouser pour tellement de cas récents : « Ce qu’il y a d’affolant, de détraquant, de désespérant, ce n’est pas la catastrophe elle-même, qui est en réalité peu de chose auprès de la catastrophe arménienne, par exemple, dont nul, parmi ce beau monde, ne songeait à s’affliger. » Voilà l’imprécateur dans sa plus admirable posture et sur des réflexions tellement modernes. Vite, vite, y retourner !

Vendredi 22 août, 0h43
Les parents de ma BB – laquelle gère les urgences cette nuit – sont arrivés ce soir pour un séjour lyonnais jusqu’au tout début septembre. Dans une grosse semaine, les festivités de la Caclinade formeront le point d’orgue de leur passage. Je me dois d’être un peu plus convivial pour ne pas leur apparaître comme un bourru inaccessible.
Les JO de Pékin vont s’achever bien médiocrement pour la France, comme je l’avais pressenti. Une nation comme la Jamaïque vient même de nous dépasser par son cumul de médailles d’or en athlétisme. La plupart des espoirs ont déçu ou n’ont pas rempli leurs ambitieux objectifs : c’est à des inconnus du public que les plus belles prouesses sont à attribuer. Les prochains à devoir subir une nouvelle pression en vue des JO de Londres, en 2012.

Mercredi 27 août, 22h51
Qu’une personnalité politique de la stature de Gorbatchev s’inquiète du risque de « cataclysme mondial » suite à la reconnaissance, par la Russie poutino-medvedevienne, de deux bouts du territoire géorgien, l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, qui ont proclamé leur indépendance, laisse soucieux, pour le moins.
Il y a quelques années, je confiais ici mes craintes d’un surgissement, sans qu’on s’y attende, tout focalisés que nous sommes sur la lutte antiterroriste, d’un coup de force étatique selon la bonne vieille méthode de la revendication territoriale suivie d’intimidations à l’adresse de la communauté internationale. Réaction de celle-ci à l’aune de son inefficacité consubstantielle : du virulent verbeux, mais aucune sanction concrète.

Dimanche 31 août
Un peu pâteux après la journée Caclinade à Saint-Vulbas. Une centaine de convives de midi à quatre heures du matin pour les plus noctambules. Je n’ai pu échapper à un final grognon, en retrait, où ne comptait plus que le rejet et l’ignorance du contexte. Rien à tirer de mon sale caractère : je me suis alors isolé pour une marche purgative.

Mercredi 3 septembre
23h21. Kahn a raison : nous reprochons à la Russie ce que nous avons entériné et soutenu avec le Kosovo. Cette tendance à l’émiettement de territoires, au nom de revendications ethniques, peut très vite dégénérer et engendrer des radicalisations en chaîne.
Nous voilà donc revenu aux tensions traditionnelles avec succession de déclarations jusqu’aux boutistes et d’hypocrisies diplomatiques. Côté Russe, une propension à hausser le ton pour marquer sa condescendance de grande puissance figurée. Côté Union européenne, l’absence d’unité de position, sauf pour les évidences et les portes ouvertes. Les ronds de jambe européens répondent bien timidement aux claquements militaires des semelles russes. L’œil rivé sur nos approvisionnements énergétiques, nous ondoyons nos mises en garde pour ne pas braquer trop brusquement l’immense voisin.
Pour s’évader de ces miasmes internationaux, revenons vers la musique : ce soir, vu un documentaire revigorant, Happy birthday Jazz in Marciac. Demain soir, Coldplay sur scène…

Vendredi 5 septembre, 1h42 du mat.
Fourbu, les gambettes à plat, mais toujours imprégné des ondes sonores du quatuor anglais. Il a fallu passer sur les conditions étouffantes, surchargées, aux têtes et hauts corps entravant le regard, mais le rendu des artistes en valait très largement la peine.
Chris Martin s’essaye à quelques mots en français et dévoile ses goûts de pianiste pour, entre deux morceaux, jouer quelques notes de… Satie ! Incroyable ! Mon préféré, et de loin, en musique classique interprété par le meneur de Coldplay.
Le point fort de leur show : avoir su allier la profusion technologique en sons et lumières, en projections et effets divers, avec des instants intimistes mêlant piano et voix, gratte et harmonica… Une palette complète sans fausse note.

Samedi 6 septembre, 0h18
Je vais devoir me remettre à flot d’actualité, au plus tard pour le 15 septembre, vraie rentrée pédagogique pour moi, plus prégnante encore le 22 avec le début des préparations aux concours de SPP 2ème classe, lieutenant et de divers métiers dans la sécurité.
Ai retenu de cette fin d’été les traditionnelles universités politiques qui tentent de marquer leur territoire respectif. Le PS patauge encore puisque aucun leader incontournable n’émerge et que la foire aux combinaisons, alliances d’antichambres, aux évolutions de circonstance, est plus riche que jamais. Vraiment l’impression, comme le théorise le prolixe Christophe Barbier, que les socialistes français veulent consolider leur parti d’élus locaux alors que la voie nationale les démobilise ou, plus subtilement, développe leur capacité d’auto-neutralisation.
9h34. Oublié de noter qu’au JT de TF1 du vendredi soir des images du camping de Fontès ainsi que des vignes alentour en charpie ont illustré le sujet sur des orages violents survenus dans l’Hérault. Je m’inquiète pour la maison en construction de maman et Jean ainsi que pour les vignes de l’oncle Paul. Si pour ces dernières mes craintes se confirment, la maison rue de la République, où résidaient mes chers grands-parents, présente quelques dégâts : véranda du premier étage envolée, vitres cassées, pour ce que l’on sait… L’atelier de Liliane et Paul jouxtaient la véranda : j’espère qu’aucune de leurs œuvres n’a subi de dommages. Affective pensée pour eux deux.

Dimanche 7 septembre, 23h18
La dernière semaine à caractère administratif s’amorce pour moi. Le pédagogique reprendra sa charge pleine pour de longs mois. Il était donc temps, pour être encore disponible, d’avoir quelques entrevues amicales. Le cas dès lundi soir avec un passage à Lyon de Sonia, pas vue depuis au moins deux ans [à vérifier]. Je l’accueille pour la soirée et la nuit, et elle s’en retourne le lendemain à Big Lutèce après avoir eu son audience. Grand plaisir de revoir cette amie connue à la Sorbonne, même s’il ne semble pas y avoir eu de changement positif dans son existence.
Au contraire, la vie d’Elo, que je dois voir mercredi matin pour une balade improvisée, s’élance vers un bouleversement total : un changement de département, une quotidienneté sentimentale et un horizon professionnel à préciser.
Eu un tout petit courriel de Shue répondant à mon mot d’affection : elle semble bien aller. Les années vont passer sans que l’on puisse retrouver cette proximité complice. Quoique l’amitié puisse perdurer malgré l’éloignement, elle se maintient plutôt comme une position de principe sans plus les atours humains attenants. Combien de personnalités perdues de vue et que j’aurais aimé garder à portée d’affection. Finalement, un peu comme si elles étaient décédées. L’absence s’équivaut puisque je ne sais plus ce qu’elles vivent.
Et puis les réamorçages qui font flop ! Exemplaire, celui avec Cécile M. Une entrevue à Lyon qui a finalement eu lieu, mais depuis plus rien. Pire même : une volonté de ne plus reprendre le lien de mon blog principal sur son site refondu. Sa volonté propre ou celle de son concepteur internet qui est peut-être son mari. J’ai donc aussi procédé à un nettoyage en règle. Rien à s’apporter, sans doute. Laisser glisser et ignorer, jusqu’à oublier.

Alors qu’à gauche les têtes socialistes s’étripent, qu’à droite l’UMP suit les consignes de son président de chef, Bayrou s’acharne à la voie insoumise, inclassable, presque iconoclaste ! L’opportuniste Hervé Morin, qui l’a trahi pour se proposer comme ministre, tente aujourd’hui de se distinguer de la masse gouvernementale par une grogne mesurée contre le système de fichage et de renseignements Edvige. Un procédé qui, sur le principe, existait déjà de fait. Encore une magistrale hypocrisie qui va faire s’agiter les oppositions tous azimuts.

Mercredi 10 septembre, 0h37
Une perception quasi léthargique du monde. J’ai beau me forcer, l’actualité ne provoque plus ni colère ni enthousiasme. Comme une banale morosité… jusqu’au refroidissement final. La sinistre, même drolatique, épopée des Bronzées résume les facettes écoeurantes de l’humanité.
16h, bord du Rhône. Dans une heure, petite entrevue gourmande d’Elo chez Nardone. Son départ de Lyon rendra ces moments plus exceptionnels, en espérant ne pas la perdre de vue.
A la veille des sept ans du 11 Septembre, constat de la dégradation des conditions de lutte contre les talibans. Les récentes pertes françaises (dix soldats tués et quelques dizaines blessés dans une embuscade) laissent présager un tribut bien plus conséquent de la France dans l’engagement anti-Al Qaida, à déduire du choix politique d’un renforcement des troupes présentes. Les Occidentaux connaîtront-ils la même humiliante défaite finale que celle des soviétiques dans ces contrées idéales pour la guérilla ?
Beaucoup plus passionnant, le lancement aujourd’hui du LHC (Large Hadron Collider) : l’étude de collisions à la puissance astronomique dans l’infiniment petit pourrait ouvrir quelques portes de connaissances et de compréhension pour l’antimatière, les bosons de Higgs, l’énergie sombre et les particules primordiales. La métaphore d’un physicien pour expliquer le colossal objectif en matière d’énormité et de concentration de l’énergie obtenue : l’équivalent de celle d’un groupe de quatorze moustiques dans un espace « mille milliards de fois plus petit qu’un diptère ». Cette quête des premiers instants de l’univers fascine et devrait éloigner un peu plus des arriérations religieuses, même si certains ont surnommé le boson la « particule divine ».

Jeudi 11 septembre, 22h17

Les Faurisson du Onze Septembre

Bien curieuse complaisance du journal Le Monde envers les négationnistes du Onze Septembre. Voilà le type de commentaire qu’il laisse passer sur son site : « Qui a déclenché la démolition contrôlée des 2 tours du WTC ? Il faut beaucoup de naïveté dans les neurones pour adhérer à la thèse du Bunker sophistiqué dans les grottes troglodytes d'Afghanistan ! Eric Laurent et Thierry Meyssan nous ont mieux éveillé la conscience que Le meilleur des Mondes sur la préparation par les américains eux-mêmes de ce New Pearl Harbour dont la mise en scène est Made in USA » (Jabiru, 11.09.08 à 16h50).
Finalement, le quotidien est à l’image d’un pays qui, juridiquement, a fait son tri entre le révisionnisme insupportable, de facture criminelle, et celui, de bon ton, que l’on peut même aller défendre sur des plateaux-bavoirs de télévision.
Certains confondent l’analyse géostratégique du 11.09, la critique en amont et en aval de l’attaque avec la crétinerie simpliste du complot. L’un des colporteurs de cette fiente intellectuelle, le Jabiru précité, a facilement passé la barrière virtuelle des modérateurs du Monde. Pour cet allumé, bien dissimulé derrière son confortable pseudo, l’attaque contre le WTC et le Pentagone n’est rien d’autre que l’œuvre du pouvoir américain lui-même ! Sept ans après, la crème des cons prospère…
La voie naturelle, si le courage avait quelque droit de cité au côté de leur perversité morale, devrait les conduire à quitter notre univers occidental pour embrasser la cause talibane. Ah, mais j’oubliais : sûrement une bande de Ricains mal rasés ces Talibans. Pignoufs !
Pour prolonger l’imparable logique de ces chevaliers rances : les attentats en Espagne ont, sans aucun doute, été commandés par Zapatero et ceux de Londres par l’empaffé Blair, l’ex croupion de Bush… Et Al Qaida ? Rien qu’un folklore en trompe l’œil…
Ces collabos-là, ceux qui défendent ces thèses, ne risqueront-ils jamais rien sur notre sol ? Nous allons les laisser insulter et traîner dans la merde notre choix de civilisation ainsi que minimiser, voire nier, jusqu’à l’indécence, la responsabilité première des intégristes islamistes ?
Cela m’inclinerait presque à me dispenser de tout sens critique contre l’administration Bush tant il faut se démarquer de ces ordures ordinaires, dérisoires et anonymes. Là, c’est l’instinct civilisationnel qui doit primer toute exégèse des terribles attentats de 2001.

Mercredi 17 septembre
Ambiance de fin d’un cycle économique. Ce que j’avais pressenti dans Coup de pouce… dans l’cul en janvier dernier se confirme un peu plus chaque jour. La réalité de la dégringolade du capitalisme financier atteint une telle gravité qu’elle oblige l’Etat américain à un interventionnisme de type socialiste inégalé par sa proportion.
Si la banque financière Lehman Brothers n’a pas été aidée par la Fed, cette dernière vient de lâcher 85 milliards de dollars pour sauver l’assureur AIG.
Dans cet univers de la rumeur, du panurgisme et de l’opportunisme, chaque entité financière va tenter de sauver sa peau, quitte à sacrifier ceux d’en face…
Ce système de financement anonyme et de marchandisation des créances a atteint son point de rupture. Rien de sain n’en ressort.
Entre les résurgences nationalistes, les coups de boutoir terroristes et la déliquescence du système financier, l’histoire dramatique de l’humanité ne s’est jamais si bien portée.
En France, les officiels, et notamment Madame Coué-Lagarde en charge de l’économie, minimisent l’impact en France de la crise mondiale. La leçon de Tchernobyl n’a pas suffit. Laissons venir la vague destructrice mais, en attendant, restons la tête dans le sable.

Jeudi 18 septembre, 22h46
Saloperie d’anonymat ! En économie aussi il faudrait éradiquer cette déviance qui favorise les plus absurdes abus.
Se plonger dans la période florissante qui a préparé le lit du chaos, qui se dessine aujourd’hui, ne peut qu’édifier : des milliers de structures financières accordant à tout va du crédit, ne se préoccupant pas de la capacité réelle, et à long terme, des ménages emprunteurs à rembourser, puisque l’objectif premier de l’organisme prêteur était de se séparer de la créance par la titrisation. Dématérialisées, sans identité, ces créances mutées en obligations ont pu ainsi infecter l’ensemble du réseau financier.

Samedi 20 septembre, 0h35Les Gras SousIl est une étonnante contrée qui concentre le pire des comportements humains. Les occupants, durables ou éphémères, s’amoncellent en grappes bruyantes, succombent aux rumeurs, cultivent le grégarisme et en surajoutent dans l’effet d’entraînement vers les cimes ou les abysses.
Je n’ai jamais investi volontairement un kopeck, un franc ou un euro dans cette sphère interlope où gesticulation vaut action, coup réalisé vaut engagement et arrivisme vaut ambition. Je m’en pare comme la plus digne des décorations, là où nombre s’encanaillent à miser sur telle ou telle valeur, participant de fait au dévoiement du capitalisme.
Cette contrée, donc, cumule les tares, les innommables et mobilise pourtant les plus puissants centres financiers pour la sauver de sa logique déliquescence. Ahurissant. Comme le coprophile se repaît de sa matière répugnante, la foultitude d’organismes financiers reçoit les perfusions nourricières des banques centrales. Surtout qu’ils poursuivent ce jeu avec tous les produits anonymes.
Mille milliards de dollars : pas une nouvelle insulte du truculent capitaine Haddock, mais l’estimation de ce que va coûter la récupération des déjections titrisées. Quelle autre cause pourrait, à cette hauteur astronomique, mobiliser de tels fonds ? L’environnement en perdition, les populations africaines aux abois, la lutte contre les fléaux naturels, la recherche fondamentale, l’aide à la création ? Non. Tout ça, juste pour quelques centaines de milliers d’obscurs joueurs sur marchés qui s’entraînent les uns les autres dans un infernal yo-yo. Ecoeurant.

Mercredi 24 septembre, 22h18
La charge de travail alimentaire a repris sa place avec sa nécessaire plongée dans l’actualité.
Amusant paradoxe : parmi les aspirants Lieutenants SPP, qui relèvent de la fonction publique territoriale, une jeune femme avoue son regret qu’il n’y ait pas eu de révolte généralisée, comme un certain Mai 68. Pas la première qui me tient ce discours, avec des motivations à l’inverse du « changer la vie » de nos aînés. En 2008, la source des ires tient dans la baisse claironnée du pouvoir d’achat. Comme si une grève générale en France pouvait avoir une quelconque influence sur les prix de vente. Foutaise de matérialistes obsédés par leur capacité à consommer ! Minable et irréaliste.

Vendredi 26 septembre

La revanche du pire
L’air gourmand de certains anticapitalistes qui, enfin, tiennent leur revanche après l’évacuation de l’idéologie criminelle qu’ils soutenaient aux temps de la Guerre froide, n’augure rien de bon.
Cette nuit, le premier débat Obama-McCain ne pourra éluder la crise financière majeure. Si, effectivement, le « tsunami financier » (expression d’Attali) emporte l’économie américaine, l’Europe, l’Union européenne plus précisément, n’aura pas d’autre choix que de construire un nouveau modèle de croissance.
L’inquiétude doit nous tenailler si se dessine comme première puissance, dans un premier temps qu’économique, mais pour la suite militaire, un Etat autocratique. La résurgence des nationalismes, des appétits croisés et des virulences provocantes pourrait faire revenir au premier plan une violence étatique que d’aucuns voulaient croire révolue. Lorsque le regard se concentre sur le terrorisme, il néglige les menaces traditionnelles. Une crise financière qui dégénèrerait en crise économique mondiale favoriserait les stratégies agressives.
Que sait-on réellement de l’objectif des pouvoirs chinois, russes, etc. ? Rien, en dehors des postures officielles. La circonstance exceptionnelle d’un effondrement américain pourrait aiguiser des appétits jusqu’alors bien dissimulés.
Par ces quelques réflexions, je n’excuse en rien les dérives capitalistes. Dès le 18 août 2007, j’écrivais, dans mon Journal, sur la crise des subprimes. L’occasion d’insister sur le crétinisme comportemental de certains milieux financiers, avec ses rumeurs délétères et son suivisme amplificateur :
« Parc désert, étendue d’eau paisible, si loin des agitations boursières. Le libéralisme à tout prix, étendu à l’économie virtuelle, connaît sporadiquement ces hoquets, décrochages qui paniquent les détenteurs de titres. On peut être pour le capitalisme, sans réserve, et considérer comme caverneuses les hystéries de la finance mondiale.
Internet a eu sa bulle boursière inconsidérément gonflée pour, un beau jour, ruiner les plus aveugles. Depuis, pourtant, Internet grandit toujours, tel un univers en expansion, et fait la fortune des plus avertis. La marque Google n’est-elle pas reconnue comme la plus chère du monde, avant Microsoft et Coca Cola ? Les pionniers de cette dimension du réseau mondial n’avaient donc pas tort de croire aux potentialités économiques du système virtuel, mais le grégarisme amateur a fait imploser les valeurs attribuées à des milliers de jeunes pousses du Net.
Si on doit pointer l’inconséquence d’organismes financiers atteints de prêtite aiguë, si l’on doit soupçonner les agences de notation des émetteurs d’emprunts, au mieux, de s’être vautrées dans la complaisance, au pire d’avoir masqué les difficultés de ces établissements qui les financent, on ne peut se limiter à la stigmatisation des boucs émissaires qui évitent de s’interroger sur la tare consubstantielle.
Aujourd’hui, toute la complexité des causes des baisses boursières ne doit pas occulter la simplicité dérisoire du suivisme, de l’amplification des rumeurs, de la méfiance soudaine, du chaos cultivé. De vraies grossières ficelles psychologiques qui déterminent, et c’est là le point inquiétant, une bonne partie de la santé économique mondiale. Poupées gigognes non décoratives, plutôt du genre affligeant, où la tête d’épingle incommode le tout.
Comme souvent, ce n’est pas le système qui présente des vices, mais les vices humains qui dénaturent le système. Primaires de Cro-Magnon pour encore longtemps, nous sommes. »

Lundi 29 septembre, 22h20
L’alliance des contraires a permis le rejet du plan d’Henry Paulson, le secrétaire au Trésor américain. Entre les jusqu’aux boutistes du libéralisme qui prônent la purge naturelle du marché financier et les dénonciateurs d’un choix qui vise à sauver les possédants sans se préoccuper des expulsés de l’immobilier, la majorité de rejet a été atteinte.
Les analystes n’envisageaient pas l’hypothèse d’un tel refus. Si jeudi un nouveau vote n’entérine pas la stratégie Paulson, la ronde déliquescente s’engagera dans un tourbillon destructeur de richesses.
Pourrait-il y avoir conjonction des chaos entre l’implosion du système financier et des attaques hyper terroristes ou étatiques ? Espérons que non… Que la barbarie soit limitée. La récession est déjà là, avec son cortège de sacrifiés.

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